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un de ces principes tels que l’amitié, la discorde, l’esprit, le feu ou tout autre pareil, nous dirons donc que c’est une étrangeté de leur part que d’avoir passé sous silence la fortune, soit qu’ils n’en admissent pas, soit qu’ils en reconnussent l’existence, et cela alors surtout qu’ils en font usage. Ainsi Empédocle dit que ce n’est pas constamment que l’air se sépare pour se placer tout en haut, mais qu’il en est à cet égard comme il plaît à la fortune ; tellement qu’il écrit dans sa cosmogonie : « Il se rencontra que l’air s’étendit alors de cette façon, mais souvent ce fut d’une autre. » Ce philosophe dit encore très souvent que les parties des animaux ont été produites par le fait de la fortune. D’autres assignent comme cause à notre ciel et à tous les mondes le hasard ; en effet, c’est du hasard que provient la formation du tourbillon et du mouvement, qui ont séparé les éléments et amené l’univers à l’ordre que nous voyons. Or ceci encore est bien pour surprendre. Ils professent, en effet, que l’existence et la production des animaux et des plantes ne sont pas dues à la fortune, que la cause en est dans la nature, dans l’esprit, ou dans quelque autre chose de tel (car, disent-ils, ce n’est pas ce qui plaît à la fortune qui naît de la semence de chaque être ; de celle de tel être, c’est un olivier, de celle de tel autre, c’est un homme), tandis que le ciel et les plus divins des êtres visibles proviendraient du hasard sans avoir aucune cause comparable à celle des animaux et des plantes. [196b] Si toutefois il en était ainsi, cela même aurait été digne de remarque et on aurait bien fait d’en parler. Car, outre que ce qu’on avance est, à d’autres égards encore, contraire à la raison, l’étrangeté de la thèse est rendue plus grande par le fait qu’on voyait que dans le ciel rien n’arrive par hasard, au lieu que, dans les choses qui, disait-on, ne proviennent pas