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lement une grande importance. Il est donc raisonnable et juste, puisque les choses qui méritent l’estime des hommes d’un âge mûr, sont tout autres que celles qui intéressent l’enfance, qu’il y ait également quelque différence entre les goûts des gens de mérite ou de vertu, et ceux des hommes vils ou méprisables. Or, comme on l’a déjà dit bien des fois[1], il n’y a de réellement important et agréable que ce qui l’est aux yeux de l’homme de bien : mais les actions que chacun préfère à toutes les autres, sont celles qui sont le plus conformes à sa nature et à ses dispositions propres ; et, par conséquent, celles qui obtiennent la préférence de l’homme vertueux, sont les actions conformes à la vertu.

Le bonheur ne se trouve donc pas dans de frivoles amusements : car il serait absurde d’en faire le but de toute sa vie, de ne s’occuper et de ne prendre dé la peine que dans la vue de s’amuser. Il n’y a rien, pour ainsi dire, que nous ne recherchions en vue de quelque autre chose, excepté le bonheur, parce qu’il est la fin, ou le but, par excellence. Ce serait donc une sorte de stupidité, et une puérilité excessive, que de ne se proposer, dans ses travaux et dans ses occupations les plus sérieuses, d’autre objet que l’amusement. « Jouer, afin d’être capable des occupations sérieuses, » comme dit Anacharsis, est, ce semble, une maxime fort sage ;

  1. Voyez l. i, c. 8 ; l. 3, c. 4 ; l. 9, c. 6.