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vertu (car faire des choses honnêtes et vertueuses, est du nombre des actions préférables en elles-mêmes). [On peut aussi ranger dans cette classe] les divertissements ou les jeux agréables ; car on ne les préfère pas comme moyens d’arriver à d’autres choses : au contraire, ils sont plutôt nuisibles qu’utiles, nous faisant négliger le soin de notre santé et celui de notre fortune. Cependant, la plupart de ceux dont on vante la félicité ont recours à de tels amusements, et c’est ce qui fait que les hommes qui s’y montrent ingénieux, et qui savent s’y prêter, jouissent d’une grande considération auprès des tyrans. Car ceux-ci se montrent favorables et bienveillants dans les choses qui sont l’objet de leurs désirs ; ils ont besoin de pareilles distractions, et elles passent pour des moyens de bonheur, parce qu’on voit que les hommes élevés au pouvoir en sont incessamment occupés.

Mais peut-être n’est-ce pas là une preuve [en faveur de cette opinion] ; car ni la vertu ni l’esprit ou l’intelligence, d’où procèdent les actions honorables et dignes d’estime, ne se trouvent dans l’exercice d’une grande puissance : et, parce que ceux qui la possèdent, faute d’avoir jamais connu le charme d’une volupté pure et digne d’un homme libre, ont recours aux plaisirs des sens, ce n’est pas un motif pour croire qu’ils méritent, en effet, la préférence. Car, enfin, les enfants aussi s’imaginent que les choses qui les intéressent ont réel-