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Les plaisirs [véritables] seront ceux qui lui paraîtront des plaisirs ; les objets véritablement agréables, ceux qui lui plairont. Mais, si ceux qui lui déplaisent, paraissent faire plaisir à quelqu’un, il ne faut pas en être surpris : car l’homme est sujet à la dépravation ou à la corruption de bien des manières[1] ; et il n’y a que des êtres ainsi corrompus ou dépravés à qui de tels objets puissent paraître agréables.

Il ne faut donc pas hésiter à déclarer que ce qui est reconnu pour infâme ne saurait être un plaisir que pour des hommes dépravés. Mais, entre les plaisirs qui semblent conformes à la vertu, quel est celui qu’il faut déclarer propre à l’homme ? Ne le doit-on pas reconnaître aux actions ? car les plaisirs en sont un accessoire indispensable. Soit donc qu’il n’y ait qu’une action unique ; soit qu’il y en ait plusieurs qui appartiennent à l’homme vertueux et parfaitement heureux, les plaisirs propres à donner à de telles actions leur degré de perfection, pourront proprement être appelés les plaisirs de l’homme ; les autres né mériteront ce nom que

    dans un sens plus absolu, ou plus général,) la maxime du sophiste Protagoras ; « L’homme est la mesure de tout. » Par où il entendait que les choses sont toujours et réellement, pour chaque homme, ce qu’elles lui semblent être. Doctrine que Platon a discutée avec beaucoup d’étendue dans le Cratylus, et surtout dans le Theætetus.

  1. Voyez, sur ce sujet, les sages et éloquentes réflexions de Cicéron, au commencement du troisième livre des Tusculanes.