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près le sentiment universel, la volupté. Car personne ne demande pourquoi on a du plaisir, attendu qu’on recherche le plaisir pour lui-même. Ajouté à quelque autre bien que ce soit, par exemple, aux actes de justice et de sagesse, il leur donne plus d’attrait ; en un mot, le bien s’accroît, en quelque sorte, par lui-même.

Toutefois ce raisonnement peut prouver que le plaisir est au nombre des biens, mais non pas qu’il soit plus excellent qu’un autre ; car tout bien, ajouté à un autre, aura plus de prix que s’il était seul. Platon même prouve, par de semblables raisons, que la volupté n’est pas le souverain bien[1], puisqu’une vie agréable, lorsque la prudence s’y joint, doit être préférée à une vie dépourvue de raison. Or, si le mélange de ces deux choses a plus de prix, il s’ensuit que la volupté n’est pas le bien suprême : car rien de ce qu’on pourrait ajouter à un tel bien, ne pourrait lui donner plus de prix ; et il est évident que toute autre chose, qui, ajoutée à quelqu’une de celles qui sont des biens par elles-mêmes, la rendrait préférable, ne saurait être le bien par excellence. Quelle est donc la chose de ce genre qui puisse être notre partage ? Car voilà ce que l’on cherche.

Objecter, comme on l’a fait, que le bien par excellence n’est pas l’objet des désirs de tous les êtres, c’est presque ne rien dire : car on doit croire à la

  1. Platon revient sur cette assertion, en divers endroits du dialogue intitulé Philebus.