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peut plus exister, comme on le voit pour la Divinité [par rapport eux hommes].

C’est ce qui a donné lieu à la question si les amis doivent souhaiter les plus grands de tous les biens à leurs amis, comme de devenir des dieux ; car dès lors ils ne seront plus pour eux des amis, ni, par conséquent, des biens, puisque les amis sont des biens véritables[1]. Si donc on a eu raison de dire qu’un ami veut du bien à son ami, uniquement pour lui-même, il faudrait qu’alors celui-ci, quel qu’il fût d’ailleurs, continuât toujours d’être le même[2]. Quoi qu’il en soit, on souhaitera à son ami les plus grands biens que puisse comporter la condition humaine, mais peut-être pas tous ; car chacun souhaite, surtout pour soi-même, les biens [proprement dits et dans un sens absolu[3]].

VIII. La plupart des hommes, par un sentiment d’ambition, semblent désirer qu’on les aime

  1. J’ai cru pouvoir adopter ici le sens suivi par les traducteurs latins, quoique un peu différent de l’interprétation de l’auteur de la paraphrase, adoptée par Mr Coray, qui est, à quelques égards, plus conforme au texte, mais qui me semble l’être moins à la liaison des idées.
  2. C’est-à-dire, d’être l’ami de celui qui a fait de tels vœux en sa faveur.
  3. Les souhaits et les vœux ne peuvent contribuer en rien, soit pour nous-mêmes, soit pour les autres, ni à la vertu, ni au bonheur qui en dépend. L’examen de ce genre de questions ne saurait donc conduire qu’à des subtilités ridicules ou puériles ; et à des conclusions qui choquent à la fois le sentiment et la raison.