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de jugement appliquée à ce qui est utile, l’obtenant, par les moyens convenables, dans le moment et de la manière qu’il faut.

Enfin, on peut avoir pris une sage résolution, dans le sens général et absolu, ou bonne pour une fin particulière et déterminée ; l’une, par conséquent, propre à réussir généralement, et l’autre, dans quelque cas particulier : or, si délibérer sagement est le fait des hommes prudents, il s’ensuit que la sage résolution consistera dans une rectitude de jugement qui s’applique à ce qui est avantageux, pour une fin dont la prudence nous donne une conception ou une notion véritable.

X, Le discernement[1] et le manque de discernement, qui nous ont donné occasion d’appeler certaines personnes intelligentes, et d’autres stupides, n’est pas tout-à-fait la même chose que la science, ou l’opinion ; car alors tous les hommes seraient intelligents[2]; Ce n’est pas non plus une science à part, comme la médecine (car alors elle s’occuperait de ce qui est bon pour la santé), ou la géométrie, car celle-ci traite de la grandeur. D’ailleurs, le discernement n’est relatif ni aux

  1. Voy. M. M. l. i, c. 35, où il est dit que le discernement est une partie de la prudence. Le mot σύνεσις, que je traduis par discernement, peut signifier aussi coup-d’œil, sagacité, pénétration ; mais ces deux dernières expressions me paraissent se rapprocher davantage du sens propre du mot grec ἀγχίνοια , que j’ai traduit par sagacité, dans le chapitre précédent.
  2. Car il n’y a point d’homme qui n’ait quelque degré de science ou de connaissance, et quelques opinions.