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observer en chaque chose la convenance ; car les mêmes choses ne conviennent pas aux hommes et aux Dieux, à un temple et à un tombeau. Mais chaque dépense doit être considérable en son genre ; la plus magnifique est celle qui est considérable dans un genre important ; et ici, celle qui est considérable, dans le genre dont nous parlons. Au reste, l’importance de l’œuvre ou du résultat ne se mesure pas sur celle de la dépense : ainsi le plus beau ballon ou le plus beau flacon peuvent avoir toute la magnificence convenable à des cadeaux qu’on donne aux enfants ; mais le prix qu’on y peut mettre est toujours peu considérable, et n’a rien de libéral. Voilà pourquoi le caractère du magnifique consiste à agir avec magnificence dans tout ce qu’il fait ; car alors il sera difficile de le surpasser, parce que sa dépense sera toujours proportionnée a la valeur ou à l’importance de l’objet qui y donne lieu : tel est donc le magnifique.

Mais l’homme sans discernement et sans délicatesse, pèche, comme on l'a dit, par l’excès d’une dépense faite contre la convenance ; car il prodigue l’argent pour des objets peu importants, et l’affectation de briller à ce prix a quelque chose de choquant ; Ainsi, dans un pique-nique[1], il dépensera, pour sa part, autant que s’il donnait un

  1. C’est-à-dire, s’il reçoit chez lui des amis qui sont convenus de fournir chacun son écot ; c’est le sens du mot ἑρανισάς. Voyez les notes que Mr  Coray a jointes à sa traduction française des Caractères de Théophraste, page 166.