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ou d’un médiocre intérêt. C’est le cas de celui qui dit [dans Homère] : « Plus d’une fois mes dons ont secouru l’infortuné errant et accablé de misère[1]. » Mais on appelle magnifique celui qui se montre généreux dans les grandes occasions : car le magnifique est sans doute libéral, mais le libéral n’est pas toujours magnifique. En fait d’habitudes ou de dispositions de ce genre, le défaut s’appelle mesquinerie, lésinerie, et l’excès se nomme vanité grossière, étalage ridicule[2] ; et c’est le caractère de toute dépense considérable et excessive, qui n’est pas appliquée à des objets convenables, mais que l’on fait pour briller dans des occasions où elle n’est pas placée, et d’une manière qui ne convient pas. Au reste, nous reviendrons sur ce sujet. Il y a dans le magnifique comme un degré de science ou de connaissance, puisqu’il est capable de juger de ce qui convient, et de faire de grandes dépenses avec noblesse et dignité. Car l’habitude[3], comme je l’ai dit au commencement, est déterminée par les actes qui la constituent : or les dépenses du magnifique sont considérables et convenables ; tels devront donc être aussi les ouvrages qui en seront le produit ou le résultat. Car ce n’est que de cette manière que sa dépense étant considérable, pourra être en proportion avec l’œuvre ; en sorte qu’il soit digne des grandes sommes qu’on

  1. Dans l’Odyssée, ch. XVII, vs. 420.
  2. Voy. Eudem. l. 3, c. 6.
  3. Voy. ci-dessus, l, i, c. 10, et l. ii, c. 1.