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est un prodigue. C’est pour cela qu’on ne donne pas ce nom aux tyrans, parce qu’il leur est difficile d’épuiser par leurs dons, ou par leurs dépenses, l’immensité des trésors qu’ils possèdent.

Puisque la libéralité est un certain milieu par rapport à l’acquisition et à l’emploi des richesses, le libéral donnera et dépensera pour les. choses convenables, et autant qu’il le faut, dans les occasions peu importantes, aussi-bien que dans les grandes, et toujours avec plaisir ; et il saura trouver des ressources où il doit, et autant qu’il faut. Car, puisque la vertu consiste à observer un juste milieu, dans ces deux choses (donner et recevoir), il fera l’une et l’autre comme il faut ; et, en effet, la disposition à acquérir convenablement est une conséquence naturelle du penchant à donner d’une manière convenable : celle qui ne serait pas telle, serait tout le contraire. Ainsi donc ces deux manières d’être, qui se suivent l’une et l’autre, se rencontrent toujours dans la même personne ; et il est facile de voir qu’il n’en est pas ainsi des manières d’être contraires. Mais, s’il arrive à l’homme libéral de faire quelque dépense peu convenable ou déplacée,il en sera affligé sans doute, mais sans excès, et comme il doit l’être ; car le propre de la vertu, c’est de n’être accessible au plaisir ou à la peine que pour des sujets convenables, et dans la mesure qu’il faut. Le libéral est d’ailleurs facile en affaires d’intérêts, car il peut souffrir même des injustices, faisant peu de cas des richesses, et étant plus susceptible d’éprouver de la peine,