Page:Aristote - Morale, Thurot, 1823.djvu/210

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

braves dans certains cas, et les autres dans d’autres. Les soldats, par exemple, se montrent tels dans les expéditions militaires ; car il y a dans la guerre mille circonstances qui semblent très-menaçantes, quoiqu’elles n’offrent aucun danger réel, et le soldat expérimenté les apprécie au premier coup d’œil. Il paraît donc courageux et brave, en comparaison de ceux qui ne savent pas, comme lui, juger de la réalité des choses. De plus, l’expérience lui a surtout appris à agir et à se garantir, à se défendre des coups de l’ennemi et à le frapper ; parce qu’il sait faire usage de ses armes, et choisir celles qui offrent le plus d’avantages, soit pour attaquer son adversaire, soit pour parer les coups que celui-ci lui porte. Aussi est-il, à l’égard du soldat inexpérimenté, comme un homme armé de toutes pièces, à l’égard d’un homme sans armes, ou comme l’athlète consommé, par rapport à celui qui ne s’est jamais exercé. Car, dans ce genre d’escrime, ce ne sont pas les plus courageux qui combattent le plus volontiers, mais ceux dont le corps a le plus de vigueur, le plus de souplesse et d’agilité.

Cependant, les soldats mercenaires deviennent timides, quand le danger est trop grand, et quand ils se voient trop inférieurs en nombre, ou dépourvus des ressources et de l’appareil nécessaires ; alors ils sont les premiers à prendre la fuite : au lieu qu’une armée, composée de citoyens, brave le péril et meurt en combattant, comme il arriva