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assez sur ce sujet. Il est donc inutile de s’occuper de la faculté nutritive de l’âme, parce qu’elle ne participe en rien à la vertu de l’homme.

Cependant l’âme semble être encore douée d’une autre faculté irraisonnable, quoiqu’elle paraisse, à quelques égards, participer à la raison. En effet, nous louons la raison de l’homme sobre et de l’intempérant[1], et, en général, nous louons la partie raisonnable de l’âme, parce qu’elle nous invite, comme elle le doit, aux actes les plus recommandables. Mais on reconnaît dans chacun de ces caractères une autre partie, qui est opposée à la raison, qui la combat et qui lui résiste, précisément comme les membres frappés de paralysie, lorsqu’on veut les mouvoir à droite, se portent malgré nous à gauche[2]. Il en est ainsi de l’âme : ses désirs, dans l’intempérant, la portent dans un sens contraire (à la raison). Mais, dans les corps, nous voyons la partie qui se refuse (aux mouvements voulus), au lieu que dans l’âme nous ne la

    épouvantables forfaits. (Voy. Plat., De Rep.l. 9, init.) Cicéron a traduit tout entier cet endroit de la République de Platon. Voy. Cic. De Divinat., c. 29.

  1. L’un et l’autre, en effet, ont la raison en partage ; l’un agit contre ce qu’elle prescrit, sachant qu’il agit mal, parce qu’il ne saurait vaincre ses désirs ; l’autre s’abstient des actes qu’elle défend, parce qu’il sait qu’ils sont criminels.
  2. Cette opposition trop fréquente entre la raison et les désirs, est admirablement décrite, et présentée sous une allégorie fort ingénieuse dans la République de Platon (l.4, p. 439 et suiv.).