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370 MORALE A NICOMAQUE.

peut tout mesurer, (domine il n'y a rieu do pareil dans les raj)ports d'affection, celui qui aime se plaint quelquefois qu'on ne répond pas à l'excès de sa tendresse, bien qu'il n'ait lui-même rien du tout d'aimable, cas qui peut fort bien se rencontrer : et souvent aussi, celui qui est aimé peut se plaindre que son ami, après lui avoir jadis tout promis, ne tient plus rien de tant de promesses magni- fiques. § 3. Si ces plaintes réciproques se produisent, c'est que, l'un n'aimant qu'en vue du plaisir celui qu'il aime, et celui-ci n'aimant l'autre que par intérêt, tous les deux se trouvent déçus dans leur attente. Leur amitié ne s' étant formée que par ces motifs, la rupture a lieu, parce qu'on n'a point obtenu de part ni d'autre ce qui avait fait naître la liaison. Ils ne s'aimaient pas pour eux-mêmes; ils n'aimaient en eux que des avantages qui ne sont pas du- rables; et les amitiés que ces avantages provoquent ne le sont pas plus qu'eux. La seule amitié qui dure, je le ré- pète, c'est celle qui, ne tirant rien que d'elle-même, sub- siste par la conformité des caractères et de la vertu.

§ A. Une autre cause de mésintelligence, c'est quand, au lieu de trouver ce qu'on désirait, on rencontre quelque chose de tout différent; car alors c'est bien à peu près ne rien avoir que de n'avoir point ce qu'on désire. C'est l'histoire de ce personnage qui avait fait de belles pro- messes à un chanteur, et qui lui avait dit, que mieux il chanterait, plus il lui donnerait. Quand, le matin, le vir- tuose vint réclamer l'exécution des promesses, l'autre lui répondit qu'il lui avait rendu plaisir pour plaisir. Si l'un

��la tliéorie de la monnaie, livre V, § /i. Hcndu plaisir pour pluisir. U ch. 5, § 8. avait fait plaisir au clianteur en lui

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