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PREFACE. LX[x

une illusion qui n'est qu'un excès de charité, il veut se persuader que c'est malgré lui qu'il a failli. L'in- dulgence est bien plus facile et bien plus douce, ({uand on se dit que le crime n'a pas été volontaire ; et le sage ne s'aperçoit pas que, dans cette fausse iliéorie, il est la dupe de sou cœur. En second lieu, il s'est fait une si haute idée de la nature humaine qu'il ne peut pas s'imaginer qu'elle soit volontairement capable du mal. 11 la suppose faite uniquement pour la science et la vertu, li'ignorance et le vice lui semblent des monstruosités presque impossibles; et il ne veut pas croire que l'intelligence puisse jamais admettre et souffrir de son plein gré d'aussi mauvais hôtes.

Ce sont là des sentiments très-louables sans doute. Mais il serait dangereux de les pousser trop loin ; et il faut surveiller avec la plus scrupuleuse attention les conséquences qui peuvent en sortir. Dire que la faute n'est jamais volontaire, c'est dire (lu'il n'y a jamais de faute; car la culpabilité ne peut consister que dans la volonté. Du moment que l'homme n'a pas voulu, il n'est point responsable de ce qu'il a fait ; et ce serait une odieuse iniquité de le condamner pour un délit où son intention n'a point participé. Le fait peut être aussi désastreux qu'on

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