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proposer, pour bien conduire sa vie, un but spécial, l’honneur, la gloire, la richesse ou la science ; et les regards fixés sans cesse sur le but qu’il a choisi, il y doit rapporter toutes les actions qu’il fait ; car c’est la marque d’une grande déraison que de n’avoir point ordonné son existence sur un plan régulier et constant. § 2[1]. Aussi, un point capital, c’est de bien se rendre compte à soi-même, sans précipitation ni négligence, dans lequel de ces biens humains on fait consister le bonheur, et quelles sont les conditions qui nous paraissent absolument indispensables pour que le bonheur soit possible. Il importe de ne pas confondre, par exemple, et la santé et les choses sans lesquelles la santé ne pourrait être. § 3 De même ici, comme dans une foule d’autres cas, il ne faut pas confondre le bonheur avec les choses sans lesquelles on ne saurait être heureux. § 4[2]. Il y a de ces conditions qui ne sont point spéciales à la santé non plus qu’à la vie heureuse, mais qui sont en quelque sorte communes à toutes les manières d’être, à tous les actes sans exception. Il est par trop clair que sans les fonctions organiques de respirer, de veiller, de nous mouvoir, nous ne saurions sentir ni bien ni mal. A côté de ces conditions générales, il y en a qui sont spéciales à chaque nature d’objets

  1. De ne pas confondre… la santé. Exemple singulier, et qui n’est pas suffisamment expliqué. L’auteur veut dire sans doute que ce serait une erreur de confondre ce qui mène au bonheur avec le bonheur lui-même, comme de confondre la santé avec les moyens qui nous la donnent. Ce qui suit éclaircit un peu plus la pensée.
  2. Ou de se promener après dîner. Il paraît que la promenade après dîner était une habitude personnelle d’Aristote.