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par le nombre de ses troupes et par la réputation du prince Eugène était arrivée au secours de la place[1] ; nos soldats avaient à essuyer tout à la fois le grand feu des assiégés, les ardeurs du soleil, les incommodités de la pluie, les inondations du Rhin. Cependant leur intrépidité et leur grandeur d’ame étaient toujours les mêmes ; ils traversaient hardiment de longues inondations, où l’eau leur venait plus d’à mi-corps, portant leurs armes et leurs habits au-dessus de leurs têtes ; ils marchaient

  1. Le prince Eugène de Savoie naquit à Paria en 1663 d’Eugène Maurice, comte de Soissons et d’Olimpe Mancini, nièce du cardinal Mazarin. Il porta quelque temps le petit collet sous le nom d’abbé de Carignan. Le roi Lonis xiv lui refusa un régiment après lui avoir refusé une abbaye. Il alla servir en Allemagne contre les Turcs. Louvois, ayant su cela, dit « qu’il ne rentrerait jamais en France » : J’y rentrerai un jour en dépit de Louvois, répondit le prince en apprenant ce propos du ministre. Les batailles d’Hochstet( 1704), de Turin ( 1706), d’Oudenarde ( 1708) où il battit les Français, furent une noble vengeance qu’il tira du mépris que Louis xiv avait fait de lui. Il fut général des troupes impériales, gouverneur de la Lombardie ; et, après avoir acquis la réputation méritée d’un des plus grands généraux, il mourut à Vienne l’âge de soixante-treize ans, en 1736.