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ne sais pas quelle doit être la vôtre. Est-ce qu’il me faudra tout vous dire comme à un petit enfant ? » Le marquis ne se possédant plus de colère, s’élance hors de son lit, court s’emparer d’une bûche, et revient sur La Pierre, qui, restant immobile et les bras croisés, lui dit d’un ton flegmatique : « Voilà donc ce

    teur, qui s’arrêta enfin faute de poitrine pour soutenir le ton élevé qu’il avait pris. « Monsieur le prédicateur, lui dit le roi, vous m’avez beaucoup édifié ; mais il faudrait encore un point dans votre sermon pour me convaincre. » Le baron, qui ne se sentait pas de force, ne jugea pas à propos de remonter en chaire, et laissa le monarque dans l’impénitence. Ce baron né riche, d’une famille des anciens barons d’Empire dans la Franconie, avait, dans sa jeunesse, assisté au sacre de Frédéric ier, roi de Prusse, en 1701. Il quitta sa patrie pour voyager, vint à Paris et y resta presque tout le temps de la régence. Il fut particulièrement considéré de madame Charlotte de Bavière, mère du duc d’Orléans, régent ; elle goûtait sa conversation à cause du grand nombre de nouvelles et d’anecdotes qu’il lui racontait et qui lui servaient pour la correspondance très-étendue qu’elle entretenait avec les personnes les plus distinguées de l’Europe. Voltaire reproche au baron de Pollnitz d’avoir changé deux ou trois fois de religion ; cela peut être faux, mais ce qui ne l’est pas, c’est que se plaignant un jour de sa pauvreté à Frédéric, ce prince lui dit : « Je suis fâché