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» Ce prince avait une espèce de maîtresse, fille d’un maître d’école de la ville de Brandebourg, établie à Postdam : elle jouait du clavecin assez mal ; le prince royal l’accompagnait de la flûte ; il crut être amoureux d’elle ; cependant, comme il avait fait semblant de l’aimer, le père fit faire à cette demoiselle le tour de la place de Postdam, conduite par le bourreau qui la fouettait sous les yeux de son fils.

» Après l’avoir régalé de ce spectacle, il le fit transférer à la citadelle de Custrin, située au milieu d’un marais. C’est là qu’il fut enfermé six mois, sans domestiques, dans une espèce de cachot, et au bout de six mois on lui donna un soldat pour le servir.

» Le prince était depuis quelques semaines dans ce château de Custrin, lorsqu’un jour un vieil officier, suivi de quatre grenadiers, entra dans sa chambre, fondant en larmes. Frédéric ne douta point qu’on ne vînt lui couper le cou ; mais l’officier, toujours pleurant, le fit prendre par les quatre grenadiers qui le placèrent à la fenêtre, et qui lui tinrent la tête tandis que l’on coupait celle de son ami Kat, sur un échafaud dressé, immédiatement sous sa croisée. Il tendit la main à Kat et