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avait stipulé et promis envers l’Espagne, ce qu’elle stipula et promit envers la France, pour Haïti, dans l’article secret du traité de Paris[1]. Le fait est, que la plupart des nouveaux États de l’Amérique espagnole avaient contracté de gros emprunts en Angleterre, et qu’ils ne pouvaient plus en servir les intérêts ; et que, d’un autre côté, ce pays éprouvait déjà un commencement de crise financière et commerciale. Le gouvernement anglais, en reconnaissant l’indépendance de ces États, voulait leur faciliter les moyens de se libérer, en même temps qu’il espérait porter l’Espagne à faire cette reconnaissance qui y eût encore contribué.

Haïti ayant déclaré son indépendance plusieurs années avant aucune des colonies espagnoles, et se trouvant, en 1823, dans une situation plus stable et plus prospère que ces colonies, Haïti pouvait certainement se demander — pourquoi la Grande-Bretagne n’avait pas agi à son égard comme envers elles ? Depuis 1804, cette puissance y faisait un commerce fructueux dans tous les ports ; et si la chute de Christophe avait fait cesser le monopole qu’elle exerçait dans son royaume, du moins, depuis neuf ans, les produits britanniques ne payaient dans la République d’Haïti que la moitié des droits d’importation imposés aux produits des autres peuples commerçans. De tels avantages, dans l’intérêt du commerce et des manufactures de la Grande-Bretagne, semblaient devoir la déterminer à reconnaître aussi l’indépendance nationale d’Haïti : ne l’ayant pas fait, le Président de la République dut se croire autorisé à attribuer son abstention au ridicule préjugé de couleur ; de là son discours du 1er janvier[2].

  1. Voyez au tome 8 de cet ouvrage, page 132, dans une note.
  2. Peut-ètre la Grande-Bretagne pourrait dire, pour son excuse que, depuis 1814, la