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Sénat lui décernât aussi une récompense nationale. Boyer s’honora donc en refusant le don qui lui fut offert par le Sénat.


Après l’insuccès de la mission confiée au général J. Boyé, et la réception des lettres de M. Esmangart qui prétendait en justifier les causes, la fête de l’indépendance, le 1er janvier 1821, venait fournir une occasion toute naturelle au Président d’Haïti, de manifester, ses sentimens personnels et de protester, au nom de la nation, contre l’injustice des puissances étrangères et de la France en particulier, qui persistaient à ne pas vouloir reconnaître le droit acquis par les Haïtiens depuis vingt ans. À cette solennité, Boyer prononça le meilleur des discours qu’il fit en pareille circonstance. S’adressant à ses concitoyens, il leur dit : « Le spectacle majestueux que vous offrez dans cette auguste cérémonie est un hommage d’autant plus glorieux au triomphe de la liberté, qu’il est présenté ici par un peuple qui, sans autre secours que son énergie, et quoique constamment en butte à de perfides machinations, a su consolider la conquête de ses droits et maintenir avec honneur son indépendance nationale. Que les ennemis de notre émancipation, aveuglés par la haine et le préjugé, persistent dans leur injustice à notre égard, que nous importe ! Vous n’en serez pas moins dignes du rang où votre courage, à l’aide de la Providence, vous a si heureusement placés. Vous serez toujours fiers d’avoir vaincu nos anciens oppresseurs, et vous serez déterminés à vous ensevelir sous les ruines de notre pays, plutôt que de vous soumettre au joug ignominieux des tyrans qui prétendraient nous asservir, etc. »

Cette dernière phrase n’était pas uniquement à l’adresse des anciens colons de Saint-Domingue et de l’armée expé-