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M. Liot qui y avait déjà paru neuf années auparavant avec la mission secrète d’observer le pays[1], et qui devait, cette fois encore, s’aboucher secrètement avec Boyer, un autre Français, le général Jacques Boyé, qui a figuré dans nos précédens volumes[2], arrivait au Port-au-Prince dans le mois de décembre 1822. Il n’était plus au service de la France, mais à celui de la Russie. En 1819, étant à Saint-Pétersbourg, il avait ouvert avec Boyer une correspondance où il lui offrait d’être utile à la cause d’Haïti, s’il était possible, et le Président le chargea de présenter au ministère russe certaines propositions touchant la reconnaissance de notre indépendance nationale. Ces propositions avaient été communiquées à M. le comte de la Ferronnaye, ministre des affaires étrangères de France, au congrès des Souverains qui se tint à Laybach en 1821, et c’était par suite de cet incident que le Président lui avait témoigné le désir de le voir[3].

Le 24 janvier 1823, M. Liot débarqua à Jacmel d’où il vint de suite à la capitale ; le 27, il fut présenté au Président par son secrétaire Colombel. Envoyé par M. le marquis de Clermont-Tonnerre, ministre de la marine et des colonies, il était chargé de notes confidentielles qu’il communiqua à Boyer, et dont le but était de porter le Président « à faire une démarche de convenance, » à envoyer

  1. Voyez pages 55 et 56 du tome 8 de cet ouvrage. Il avait rempli sa mission à la fin de 1813.
  2. Voyez notamment au 5e volume, les pages 326 à 328 et 460.
  3. Avant de venir à Haïti, J. Boyé publia à Amsterdam une brochure ayant pour titre : De la République d’Haïti et de son indépendance, par un Français, ami de la justice et de la vérité. » Il en fit hommage à Boyer. Après l’historique des évènemens qui amenèrent l’indépendance d’Haïti, il discuta la question de sa reconnaissance par la France, de manière à prouver que l’intérêt des deux pays y gagnerait beaucoup, par l’extension que prendrait le commerce français dans cette ancienne colonie ; et il concluait en engageant cette puissance à faire un traité de commerce avec les Haïtiens qui possédaient leur sol par droit de conquête, y exerçant pai suite le domaine et la souveraineté.