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Darfour, que la République avait accueilli, qu’elle avait adopté, auquel la clémence du gouvernement avait déjà accordé une fois la vie[1], l’ingrat respirait, et son âme dévorée du feu de l’ambition, méditait en secret le renversement de l’ordre social… Enfin, la foudre éclata, et l’imprudent qui l’avait attirée sur sa tête périt consumé par elle… Puisse ce dernier exemple n’être pas oublié comme les précédens ! — Vous êtes déjà instruits comment le criminel Darfour, enhardi par l’appui de quelques citoyens pervers et par l’esprit novateur de quelques membres de la Chambre des communes, qui, il faut le dire, avaient usurpé la représentation nationale, sonna le tocsin de la guerre civile dans une adresse lue publiquement à la séance que cette Chambre a tenue le 30 août dernier. Cet infâme libelle a soulevé votre indignation ; d’un mouvement spontané, vous vous êtes jetés en foule sur son coupable auteur et sur tous ceux qui en avaient été, ou les conseillers ou les protecteurs ; vous les avez mis en état d’arrrestation… Le glaive de la loi, en frappant le délit qui venait de vous outrager, vous a donné une satisfaction digne de vous ; et la Chambre des communes, en déclarant, par un acte authentique, en date du 2 de ce mois, que les citoyens Béranger, Laborde, Saint-Laurent et Saint-Martin, étaient exclus de son sein, pour avoir montré une conduite opposée au système d’union qui, seul, fera notre salut, vous a prouvé que les intentions de la majorité de ses

  1. À l’occasion de ses écrits antérieurs où il se montrait factieux, insinuant des imputations perverses contre le gouvernement, il avait été question de son arrestation et de son jugement ; mais le Président patienta, en considérant qu’il n’avait aucune influence sur l’esprit public. À cette époque, bien des personnes ont pensé que F. Darfour pouvait être « un agent secret » envoyé de France pour semer la division parmi les Haïtiens, par cela même qu’il déblatérait contre les Français et les blancs en général. Ses provocations contre eux semblaient être une manœuvre perfide pour se créer le moyen d’accuser le gouvernement du pays de tiédeur, sinon de connivence avec eux. Mais il suffisait qu’il fût l’intime de Béranger pour avoir ces idées exagérées.