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l’archevêque Pedro Valera, vieillard vénérable, entonna lui-même le Te Deum en actions de grâces. Un procès-verbal des deux cérémonies fut dressé par le Cabildo. Le Président d’Haïti fut enfin reconduit à son palais par le même cortège, et là, l’archevêque vint, à la tête de son clergé, lui faire visite et le complimenter sur la prise de possession de la partie de l’Est, qui réunissait tous les Haïtiens sous les mêmes lois[1].

Dans l’après-midi, la division Bonnet entra à Santo-Domingo.

On ne trouva pas la plus petite somme au trésor public, pas la moindre provision de bouche dans les magasins de l’État. Le gouvernement dut comprendre que, pendant longtemps encore, il faudrait pourvoir aux dépenses de tous genres par les ressources de la partie occidentale.

Le premier soin du Président fut d’organiser les difFérens services publics. Il nomma le général Borgella commandant de l’arrondissement de Santo-Domingo, dont les limites prirent dès lors, et peu après encore, les proportions du vaste département du Sud-Est, ci-devant de l’Ozama[2].

Le général Beauregard eut le commandement de cette place ; le colonel Carrié, celui de l’arsenal et du fort appelé

  1. Peu de jours après l’entrée de l’armée à Santo-Domingo, un soldat fut condamné à’mort par le conseil de guerre, pour avoir commis des violences sur des habitans de la campagne. Ce malheureux allait être exécuté, quand l’archevêque Pedro Valera vint lui-même auprès de Boyer le prier de lui faire grâce ; le Président y consentit. Cette démarche du prélat, faite au nom de la religion, porta Boyer à le vénérer ; et l’armée partageant ce sentiment, on n’eut plus à réprimer un seul acte d’indiscipline.

    M. Lepelletier de Saint-Rémy a été bien mal renseigné, quand il a parlé de cet archevêque en ces termes : « Nous voudrions ne pas dire que l’évêque de Santo-Domingo fut accusé de s’être fait l’agent de cette malheureuse intrigue (la réunion de l’Est), et que l’on évalue à cent mille gourdes le prix qui lui fut compté en retour de la nationalité de son pays. » — T. 1er, p. 333.

  2. Le général de division Francisque remplaça Borgella dans le commandement de l’airondissement d’Aquin, après être resté sans emploi depuis l’affaire des Gonaïves.