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Dans cet état de choses, on y forma, en vertu de la constitution des cortès, la diputacion provincial, assemblée représentative de la province ou colonie, chargée de contribuer aux mesures locales que le gouverneur pour l’Espagne jugerait utiles à sa meilleure administration. Les idées révolutionnaires y trouvèrent naturellement accès : elles y éclatèrent. Antonio Martinez Valdès, l’un de ses membres, en ayant manifesté avec plus de hardiesse qu’aucun de ses collègues, fut accusé, arrêté et mis en prison par ordre du gouverneur Kindelan, et jugé comme auteur principal du projet tendant à l’indépendance de la colonie. Mais il dut son acquittement, plus à l’insuffisance de preuves du délit qu’à son entière innocence[1].

Au fait, Valdès n’était qu’un complice : le véritable auteur du plan conçu à ce sujet était Nunez de Cacérès, ancien auditor de guerra ou juge militaire, qui fut compromis dans l’instruction du procès, qui s’en défendit assez bien pour ne pas être arrêté, et pour fixer sur lui les regards de tous ceux qui aspiraient à l’indépendance.

Depuis longtemps, Nunez y rêvait. Après avoir rempli sa charge avec toute la distinction de son esprit éclairé, il crut avoir des droits à une position plus élevée, non dans la partie de l’Est, mais dans une autre des possessions de l’Espagne encore soumises à sa puissance. Il sollicita du gouvernement métropolitain une charge de oidor ou juge à l’audience royale de Quito, cour de justice souveraine ; mais il éprouva un refus qui blessa son orgueil, et dès lors il n’attendait qu’une occasion de se venger de la métropole. Les circonstances survenues en 1820 dans la Péninsule

  1. A. –M. Valdès est le même personnage qui devint sénateur d’Haïti, en 1824, après avoir rempli les fonctions d’administrateur des finances à Santo-Domingo.