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faites, moyennant la reconnaissance de l’indépendance et de la souveraineté d’Haïti.

Cependant, Pétion, comptant plus sur ses concitoyens pour défendre leurs droits, saisit cette grave circonstance pour achever son système de rémunération nationale, par la distribution des biens des anciens colons à tous les officiers de l’armée et aux fonctionnaires civils, et la vente générale du reste du domaine public aux particuliers ; car il se persuada que la défense du sol ajouterait à celle de la liberté de chacun, si le pays venait à être attaqué. Et de nouvelles informations lui étant parvenues d’Europe, il donna l’ordre aux généraux de l’armée de se préparer à cette défense pour la rendre vigoureuse et triomphante.

En effet, le gouvernement royal de France se préoccupait du soin de rétablir son autorité dans son ancienne colonie. Dans ce but, il fit envoyer trois agents dont la mission devait être secrète, avec les instructions les plus perfides, puisqu’elles tendaient à exciter de funestes divisions entre les chefs d’Haïti et leurs concitoyens, pour mieux assurer le succès de l’expédition armée qu’il faisait préparer dans les ports de France. Mais cette mission déloyale fut éventée et dénoncée à Pétion et à Christophe, et les agents se virent contraints, pour pouvoir s’introduire à Haïti, de s’annoncer sous l’apparence d’une négociation régulière.

Pétion reçut avec égards le chef de cette mission qui avait ordre de conférer spécialement avec lui pendant que l’agent chargé de voir Christophe se rendait auprès de ce dernier. Une correspondance eut lieu entre eux, dans laquelle l’agent français lui proposa de proclamer la souveraineté du Roi de France dans le pays, pour