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sont pas moins empreintes de cet esprit mordant que Pétion avait parfois, à l’égard des personnes qui le mécontentaient ; et par là encore s’expliqueraient, peut-être, et ses autres paroles que nous avons rapportées, et l’affirmation donnée par Inginac dans le premier passage de ses Mémoires, cité plus avant. Au surplus, en cette circonstance, on eût dit que Pétion se plaisait à rappeler à Borgella la vieille amitié qui les liait à Léogane, quand ils servaient tous deux dans la Légion de l’Ouest, et dont nous avons cité des traits dans le troisième volume de cet ouvrage. Il l’engagea à prolonger son séjour à la capitale et fit faire son portrait pour être placé dans la salle du palais. Inutile de dire que Borgella répondit à ces témoignages d’estime, par les sentimens d’une franche cordialité[1].


Les soucis qu’eut Pétion, même le mécontentement qu’il aura éprouvé, si on l’admet par les particularités exposées ci-dessus, n’étaient pas cependant de nature à impressionner tellement cet homme d’un caractère aussi ferme, pour que l’on croie à l’influence de ces causes morales sur son âme, et conséquemment sur l’événement du 29 mars. Il faut plus chercher la cause de ce malheur dans les circonstances de l’ordre physique, auxquelles on n’aura pas porté assez d’attention à cette époque : ce qui a donné lieu à une foule d’opinions sur la mort du président.

On a vu qu’après l’ouragan du 19 octobre 1816, le pays éprouva une forte disette de vivres et une grande épidémie.

  1. En parlant à Pétion des causes qui firent péricliter son habitation, Borgella reçut ce reproche amical : « Si vous aviez suivi mes conseils, vous eussiez mieux fait, et j’aurais eu la satisfaction de vous avoir toujours près de moi. »