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Cayes, au pied de l’arbre de la liberté qu’il y avait plante ; son cœur inhumé dans l’église de cette ville.

Il s’agissait ensuite de lui donner un successeur, d’après le système départemental adopté dans le Sud. C’eût été une lâche épineuse pour le conseil du gouvernement, si déjà l’opinion publique, — celle de l’armée et du peuple, — ne s’était pas hautement prononcée à cet égard, pendant la maladie de langueur du général en chef.

Lorsqu’il approchait de sa dernière heure, le colonel Bigot, se faisant l’organe de cette opinion, envoya Eugène Hays à Aquin porteur d’une lettre au général Borgella, où il lui disait : « Rigaud va mourir ; nous avons les yeux sur toi pour le remplacer. Rends-toi vite aux Cayes où ta présence est nécessaire. » L’envoyé joignit ses instances à celles de Bigot ; il dit à Borgella, que ce colonel et d’autres officiers étaient résolus à immoler le général Wagnac aux mânes de Rigaud, dès qu’il rendrait le dernier soupir. Indigné d’un pareil projet, Borgella lui répondit : « C’est une raison de plus pour que je ne me rende pas aux Cayes : croit-on, croyez vous que j’accepterais le commandement pour permettre un tel crime ? Je suis membre du conseil, mais je suis à mon poste militaire ; je n’irai aux Cayes que lorsque le conseil m’y appellera. » E. Hays y retourna sans succès dans sa mission.

Le conseil, enfin, manda aux Cayes les généraux Vaval et Borgella ; ils y arrivèrent dans la soirée du 17 septembre. Aussitôt, Bigot dit à Borgella sa résolution à l’égard du général Wagnac ; son but était moins de sacrifier en lui un partisan de Pétion aux mânes de Rigaud, que de tuer le général commandant de l’arrondissement pour prendre sa place : infâme conception de