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l’autre a porté le trouble dans son cœur en y excitant le désir d’une position supérieure à celle qu’il occupait. Dès qu’un homme entre dans cette voie, il ne peut modérer son ardeur et il aspire au plus haut degré. Delva était un ancien colonel du Sud ; revenu dans le pays en 1807, il y trouva des égaux en grade par suite de leurs services durant son absence. Cependant, en l’envoyant à l’armée expéditionnaire du Môle, le président le promut au grade d’adjudant-général, peu après son retour ; il fut élevé à celui de général de brigade, en même temps que plusieurs autres officiers de mérite, dans la même année où la mort du sénateur Thimoté, occasionnée par sa faute et nécessitant son retour au Port-au-Prince, pouvait être une cause de retard dans son avancement. Pétion avait donc récompensé ses brillans services dans la péninsule du Nord, ce mâle courage qui le distingua sur tant de champs de bataille. Au moment où s’opérait la scission du Sud, il lui confia le commandement des troupes qui allèrent près d’Àquin ; quoique assisté du général Gédéon, nommé le même jour que lui, il dut ce commandement à son ancienneté militaire et à la confiance du président en ses talens pour la guerre, s’il fallait la faire. En cette circonstance, comme toujours auparavant, il se conduisit en bon citoyen ; sa lettre à Rigaud, du 28 novembre 1810, où il l’engageait à éviter la guerre, témoigne de ses sentimens patriotiques. Si, au Pont-de-Miragoane, il lui fît d’amers reproches sur sa conduite inqualifiable, ce fut à cause de ceux que Rigaud se permit d’adresser à son chef. Pétion pouvait lui interdire la parole, puisqu’il restait impassible et qu’il voulait user de modération ; il ne le fit pas, sans doute par considération pour un général qui soutenait la cause de la République, celle de son