Page:Ardouin - Étude sur l’histoire d’Haïti, tome 7.djvu/405

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Pétion, « qu’il voulait être un maître absolu, avoir des esclaves pour lui obéir ; et que, semblable à Christophe, il se disait le successeur légitime et naturel de Dessalines. » Cet acte, qui contenait tout le fiel et toute la haine de Blanchet, se terminait ainsi, en s’adressant aux citoyens de l’Ouest : « Ayez un sénat, si vous voulez, mais que votre sénat soit celui de l’Ouest. Ayez un président, si vous voulez, mais que votre président soit ce lui de l’Ouest. Le département du Sud se régit par ses propres lois, par son conseil et par son général en chef. »

Que l’on suive le général André Rigaud dans toute sa conduite, depuis son arrivée aux Cayes, le 7 avril 1810, jusqu’à cette adresse dont il adopta l’idée, qu’il fit revêtir du nom des principaux citoyens du Sud, qu’il fit imprimer, publier et envoyer dans l’Ouest, et l’on ne sera nullement étonné qu’il soit arrivé à cet acte furibond. Son impatiente ambition l’avait empêché d’attendre la fin de la présidence de Pétion, pour essayer de son influence sur la faction du sénat et se porter concurrent au 9 mars 1811 ; il avait cru devoir profiter de l’émotion générale éprouvée à la chute du Môle, pour effectuer son système départemental ; et, maintenant que la modération et le desintéressement politique de Pétion, le laissaient paisible possesseur du pouvoir dans le Sud, il ne pouvait se faire à l’idée de sa réélection à la Présidence de la République, qui était une protestation contre la scission du Sud, qui en assurait le terme dans un avenir plus ou moins éloigné. Voilà le motif de son irritation, la cause de cette jalousie effrénée qui le dévorait.

Cette adresse étant parvenue à Pétion, il la lut d’abord, en présence de plusieurs fonctionnaires publics, avec la