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Qui en fut cause, sinon Rigaud, qu’ils avaient tous reçu à bras ouverts ; qu’ils avaient pressé contre leurs cœurs, unis dans un même sentiment d’affection pour cet ancien chef ? Ce dernier fut-il moins coupable, en produisant ce déplorable résultat par son ambition, qu’Étienne Mentor qui, mu par une semblable passion, ou agissant dans les vues de la France, poussa Dessalines aux excès qui le perdirent ? Si Rigaud n’a eu que son ambition pour mobile, il n’a pas moins agi de manière à faire soupçonner ses sentimens, de vouloir servir les mêmes intérêts étrangers.


Il nous reste à raconter comment Borgella embrassa la cause de la séparation du Sud, après avoir désapprouvé ce projet à Jérémie ; car sa conduite influa sur celle de la plupart des militaires du département et de bien des citoyens, par l’estime générale dont il jouissait. Il nous faut dire les motifs qui le déterminèrent, pour que l’on sache s’il est excusable.

En arrivant à Aquin, venant de Jérémie, il avait fait part au général Vaval, son ami et commandant de l’arrondissement, du projet qui s’élaborait dans cette ville ; mais en ajoutant qu’il espérait encore que Rigaud aurait égard aux observations qu’il avait faites à Blanchet en sa présence. Lorsque l’assemblée départementale se constitua, on sentit aux Cayes l’importance de son adhésion, et on députa auprès de lui Dupont et Glézil fils pour le solliciter de la donner. Rigaud lui écrivit aussi à ce sujet, en lui avouant qu’il espérait que son exemple serait décisif sur l’esprit des autres chefs militaires ; et qu’il comptait sur les sentimens d’attachement dont il lui avait toujours donné des preuves.