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pouvoirs qu’il lui accorda dans le Sud : tout servit à cette influence.

On a considéré comme « une grande faute politique » de la part de Pétion, d’avoir donné ces pouvoirs à Rigaud, en l’élevant au grade de général de division et mettant le Sud en réquisition sous ses ordres, après avoir accepté la démission de Gérin en 1808 et résolu alors que les départemens de la République n’auraient plus de commandant en chef.

Mais, d’abord, il ne pouvait mieux faire pour prouvera ses adversaires que son cœur était inaccessible à la jalousie dont ils l’avaient accusé envers Gérin, qu’en donnant ce grade et cette position militaire à Rigaud. Ensuite, en lui confiant la mission politique de tenter la pacification de la Grande-Anse, il prouvait encore qu’il était incapable d’envie, et que, chef de l’État, il avait autant d’affection pour les populations du Sud que pour celles de l’Ouest.

Les antécédens de ces deux hommes, Rigaud et Pétion, en remontant jusqu’à l’affaire de Montbrun, à Jacmel, avaient démontré le peu d’estime qu’ils avaient l’un pour l’autre ; mais en 1799, Pétion avait tout sacrifié au salut commun, à la défense des idées politiques qui renfermaient l’avenir du pays, en allant se placer sous les ordres de Rigaud, en s’offrant pour aller défendre Jacmel en 1800. Devenu le chef du parti qui représentait ces idées, après la déportation de Rigaud en 1802, il l’avait noblement vengé en s’unissant à Dessalines pour conquérir l’indépendance d’Haïti. En 1808, quand le fils de Rigaud vint solliciter des secours pour soulager son infortune à l’étranger, il y avait concouru avec les autres citoyens. Maintenant, que Rigaud était revenu lui-même dans le