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qui eût roulé dans la poussière, au moindre mot qu’il aurait prononcé dans le sens d’une si haute trahison des intérêts réels de ses compatriotes.

Ces lettres, enfin, étant en la possession des Anglais, Lord Seymour, commandant de la station navale des Antilles, les envoya à Pétion, après l’arrivée de Rigaud, en même temps que deux des brigs capturés, que le président acheta pour augmenter la flotte de la République, et qui furent nommés le Conquérant et le Vainqueur.

Dès le 25 février de la même année, Pétion écrivait à Lamarre, de se reposer sur sa sollicitude à soutenir le Môle par tous les moyens possibles, surtout par la flotte ; qu’il attendait de jour en jour la frégate qu’il avait dit d’acheter aux États-Unis ; que, pour plus de sûreté, il en avait fait demander une autre en Angleterre ; qu’en outre, il attendait aussi une grande corvette. [1] Ces navires demandés en Angleterre furent remplacés par les deux brigs dont il s’agit.

En recevant la communication de Lord Seymour, Pétion eut la franchise de la montrer à Rigaud, ainsi que les lettres des colons[2]. Alors seulement, Rigaud avoua qu’effectivement il avait paru se prêter à cette mission du gouvernement impérial, pour pouvoir sortir de France et revenir dans son pays ; mais qu’il était loin d’avoir l’intention de servir cette puissance : — même échappatoire qu’employa Étienne Mentor auprès de Dessalines, ayant été également contraint à son aveu par l’exécution de Ducoudray.

  1. J’ai sous les yeux la lettre originale de Pétion a Lamarre, qui fut donnée à mon frère par un des parens de ce général ; elle est de la main de Boyer.
  2. Rigaud resta au Port-au-Prince environ un mois ; vers le milieu de mai, il retourna aux Cayes : les lettres et les brigs envoyés par Lord Seymour arrivèrent dans le courant d’avril.