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préférait d’être commandé par des blancs que par des noirs.

Le même motif subsista dans cette ancienne colonie de l’Espagne, après l’expulsion de l’armée française de la partie occidentale, pour ne pas obéir au terrible Dessalines ; on aida le général Ferrand à lui résister, en 1805, non par sentiment d’attachement à la France, mais par choix entre deux dominations également abhorrées.

Et la preuve de ces assertions, nous l’avons déjà exposée dans notre 5e volume, page 433 : en septembre 1803, les habitans conspiraient pour massacrer les Français, quand le général Kerverseau retourna de Las Caobas à Santo-Domingo, et parvint à dissoudre cette conjuration.

À lui succéda le général Ferrand qui, convaincu de ce sentiment hostile de la population, mit en usage toutes les ressources de son esprit pour la porter à rester dévouée à la France. Il maintint son autorité, non par l’amour qu’il inspirait, mais par la crainte qu’excitait Dessalines ; et quoiqu’il perpétuât l’esclavage, et fût réellement un administrateur intelligent qui développa quelque industrie dans cette partie, il ne put s’empêcher de mettre un terme à bien des abus nés de la mauvaise administration espagnole, et surtout de régler ce qui avait rapport aux biens de main-morte, qu’il soumit aux lois françaises[1]. En outre, aussitôt après la mort de Dessalines, les habitans des communes voisines de l’ancienne

  1. « Le général Ferrand proclama provisoirement l’affranchissement de la servitude monacale, à laquelle avaient succédé les domaines impériaux ; et les moyens destinés à l’entretien somptueux des cloîtres, et depuis à l’augmentation des revenus du fisc, refluèrent bientôt vers la culture qui, à sa mort, marchait à grands pas vers sa restauration. » (Extrait du Précis historique, etc., publié par Gilbert Guillermin, officier français sous les ordres de Ferrand).