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Lys était le président du sénat ; il semble que c’était à lui délire ces Remontrances, mais la lecture en fut faite par Daumec qui, en étant le rédacteur, possédait la pensée de cet acte. Daumec était d’ailleurs le plus brillant orateur du sénat, comme Bonnet en était le plus éclairé, par ses connaissances diverses.

Pétion entendit, écouta cette lecture avec le plus grand flegme, avec cette impassibilité qui était un des traits distinctifs de son caractère : aucune émotion ne trahit ce qui se passait en lui.

Le sénat venait, disait-il dans ce document, « pour s’expliquer avec le chef du pouvoir exécutif, pour connaître son arrière-pensée, lui demander, enfin, s’il était possible d’oublier les puissans motifs qui avaient occasionné l’événement du 17 octobre 1806. »

Que l’on pèse bien ces paroles et tout ce que renferme cet acte, accusant le Président d’Haïti d’une foule de faits ! accusation qui devait emprunter quelque chose de plus grave, de la voix sonore et accentuée de Daumec, qui savait y mettre de la passion. Que l’on se demande alors ce qui serait advenu, si Pétion eût voulu s’expliquer, justifier sa conduite et tous ses actes que l’on décriait ainsi !

Plus sage que les membres du sénat, que ses collaborateurs à l’édifice républicain qu’ils avaient élevé sur les ruines de la tyrannie de Dessalines, dont ils lui rappelaient la fin tragique, il se borna à leur dire : « Vous avez réfléchi et médité en rédigeant vos Remontrances ; vous voudrez bien me laisser ce document, afin que je réflé-

    romaine, qu’aux rôles de Cassius et de Brutus, que Bonnet et Lys avaient remplis, dans la tragédie de Voltaire sur la Mort de César, du temps de Dessalines. C’est cette anecdote que nous avions promis de produire.