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sont peu pénétrés de la cause que nous défendons : ils dorment sur les bords du Vésuve ! Je ne sais par quelle fatalité ils ne se rappellent plus l’an 7 (1800) dont l’époque doit être à jamais gravée dans la mémoire de nos derniers neveux… Où sont les ossemens de nos malheureux frères ?… »[1]

À cette lettre pathétique, qu’apportait Delva qui venait cette fois pour rétablir sa santé délabrée par les fatigues, — ce qui était un surcroît de peine pour Lamarre, — succéda une autre du 8 juillet, où il apprenait au président que les bâtimens de Christophe étaient venus canonner Jean-Rabel, d’où cependant ils furent repoussés également à coups de canon. À cette occasion, il fit un ordre du jour : en parlant à ses troupes des factions de Yayou et de Magloire, il leur disait que Pétion avait pardonné à des coupables ; mais que s’il y en avait dans son armée, « il n’userait pas de cette clémence hors de saison, dont l’affreux résultat procure aux États en révolution des siècles de calamité. »

Les sentimens personnels de Lamarre étaient des plus généreux ; on le reconnaît par ses précédentes lettres et celle du 4 juillet où lui-même rendait justice à ceux de Pétion. Mais on voit aussi que son ordre du jour était en désaccord avec sa correspondance ; car il y blâmait la clémence du chef de l’État envers des hommes égarés par l’ambition ou par de petites rivalités. Quelques mois plus tard, on le vit solliciter cette même clémence en faveur de l’un de ces hommes, réfugié alors au Môle et se réhabilitant à ses yeux par son courage et ses services. Il sentit tellement l’inconvenance de ce blâme, qu’il n’envoya pas au

  1. Cette lettre de Lamarre n’a pu être écrite que par Hérard Dumesle.