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l’armée est encore à Poix-la-Ravine (près de l’Arcahaie), quand elle devrait être à Saint-Marc ? Qui peut avoir ralenti l’ardeur de nos guerriers ?… Que font-ils donc ? Qu’est devenue en eux cette valeur que nos ennemis épouvantés devaient admirer ? Envoyez-moi des secours, et bientôt je vous joindrai à l’Artibonite… Je m’aperçois que le Port-au-Prince est une nouvelle Capoue où les délices énervent l’âme. » Il lui annonçait l’arrivée de Christophe au Port-de-Paix, avec de nouvelles forces, surtout en cavalerie.

Le 19, Lamarre était dans la joie, il avait reçu par le commandant Masson Dias, l’un de nos meilleurs officiers de marine, 200 quarts de poudre, 120 caisses de cartouches, du papier et des mandrins pour en faire. « Vous ne savez pas, dit-il au président, de quel pressant danger vous nous avez tirés en nous envoyant des munitions. L’armée vous fait ses remerciemens de ce présent qui sert à sa défense et aux succès des armes de la République. Nous appréhendions déjà de voir nos lauriers se changer en cyprès ; mais tout a changé depuis l’arrivée de Masson : le courage, l’espoir, tous les sentimens caractéristiques par lesquels un républicain se distingue, renaissent parmi nous[1]. »

À son tour, il envoya au président 500 boulets de divers calibres, ne prévoyant pas, tant son espoir de vaincre l’ennemi était grand, que le Môle où il était alors subirait ce mémorable siège de deux années où se distinguèrent des caractères si héroïques ! « Quant aux fusils, je ferai en sorte de vous en procurer aussi. » On ne sait s’il entendait prendre ceux de l’ennemi, ou s’il espérait les

  1. Le style de plusieurs des lettres de Lamarre nous fait soupçonner qu’elles furent écrites par Hérard Dumesle : les sentimens qu’elles expriment font son éloge.