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Attribuant à ses principaux membres comme à Pétion, la mort injuste, selon lui, de Dessalines, Chanlatte passa en revue la vie privée et publique de ces sénateurs, en leur imputant des actions odieuses ou ridicules ; et il ne ménagea pas Pétion sous le rapport politique, le traitant de tyran infernal, etc. Ceux des sénateurs qu’il maltraita le plus, furent Bonnet, Blanchet jeune, Daumec, Th. Trichet, C. Thélémaque, David-Troy, Lamothe Aigron, Lys, et le secrétaire d’État Blanchet aîné. Il s’efforça de tourner en ridicule Fresnel, Ch. Daguilh, Depas Médina, Manigat, Simon, Louis Barlalier, et surtout Gérin ; il ménagea F. Ferrier, Yayou et Magloire Ambroise, évidemment dans l’espoir que fondait Christophe sur eux, dans le but de les exciter contre Pétion et la République[1].

Mais, sous ce rapport, ce fut Gérin surtout qu’il tâchait d’exaspérer ; car il connaissait son caractère. En lui attribuant une part active dans la révolution de 1808, ce qui était vrai, il le plaignait de l’ingratitude dont on avait payé ses services, en rappelant ce qui occasionna ce dicton de Virgile : sic vos, non vobis, signifiant ainsi vous, et ce nest pas pour vous ; il ajouta : « On voit clairement que Gérin, qui, le premier, s’est mis en évidence, craint, non sans raison, que l’on ne dise de lui : — Ainsi, guerrier infortuné ! vous faites des merveilles, et c’est pour qu’un autre jouisse du fruit de vos glorieux travaux. »

Nous ne pouvons reproduire les principaux traits acérés lancés contre les sénateurs, dans cette mordante satire de Chanlatte ; et d’ailleurs, nous répugnons à nous

  1. J. Chanlatte publia son écrit immédiatement après l’évacuation du Port-de-Paix par Lamarre ; il y parlait aussi de l’insuccès de Bazelais aux Gonaïves, et cette diatribe ne parvint au Port-au-Prince qu’après la conspiration de Yayou.