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Tous les pays, tous les peuples du monde savent honorer de pareils services[1].

Loin de nous également l’idée de répudier la solidarité invoquée contre tous les Haïtiens, pour les actes barbares qui ont signalé l’établissement de notre souveraineté politique. Si nous profitons des avantages qu’elle a consacrés en notre faveur, nous devons accepter aussi avec fierté la responsabilité qui découle de ces actes ; et nous ne comprendrions pas la lâcheté d’un Haïtien qui penserait autrement.

Mais, à notre point de vue d’historien, il est aussi de notre devoir de faire remarquer ce qu’il y a eu de contraire aux droits de l’humanité, et de très-fàcheux pour notre pays, dans la fureur de Dessalines ; car il a donné une déplorable impulsion aux idées qui ont prévalu durant son administration.

Quant à la disposition de la proclamation du 28 avril, qui excluait les colons et n’importe quel Européen, c’est-à-dire tous les blancs, du droit de cité et de propriété en Haïti, — disposition qui est devenue effectivement la base fondamentale de toutes les constitutions successives du pays, — nous en avons déjà déduit les motifs, inspirés par la sûreté publique. La population indigène avait eu à lutter contre les colons, les Anglais, les Espagnols et les Français ; elle devait tout redouter de leur part. Pouvait-elle excepter de cette exclusion, les Anglo-Américains, les Portugais, les Danois, les Hollandais, etc.,

  1. Depuis 1843, il y a eu plusieurs actes rendus par divers gouvernemens, pour réhabiliter et honorer la mémoire de Dessalines, comme fondateur de l’Indépendance d’Haïti. — La France a honoré les services militaires de Rochambeau, en gravant son nom sur le bel arc de triomphe de l’Etoile, parmi ceux de toutes ses illustrations guerrières, et elle a bien fait. Haïti doit honorer aussi son Héros.