d’admettre la soumission volontaire des troupes et des populations. Dans le cas contraire, où il faudrait vaincre l’ennemi et conquérir son territoire, l’armée républicaine eût-elle suffi ? Christophe était-il donc un adversaire à dédaigner ainsi ? Et le Sud, n’avait-il pas besoin déjà d’être défendu contre l’insurrection de la Grande-Anse, qui pouvait se propager dans ce département livré naguère à l’agitation ?
Voilà quelle était la pensée de Pétion, considérant la situation dans son ensemble.
On avait vu Dessalines, dictateur unique, qui ne respirait que la guerre, à la tête de plus de 20 mille hommes au Cap en décembre 1803, pouvant pénétrer facilement dans la partie de l’Est et arriver à Santo-Domingo ; on l’avait vu surseoir à tout projet de conquête, non à cause de la soumission du Cibao, mais parce qu’il avait reconnu la nécessité de proclamer d’abord l’indépendance du pays et de l’organiser, avant de rien entreprendre ; et on aurait voulu entreprendre une marche contre l’Artibonite et le Nord, sans organisation préalable ? Gérin, aux idées extravagantes, pouvait concevoir une telle pensée ; mais Pétion, aux idées sages et prudentes, devait penser autrement.
Cependant, voyons quelle interprétation a été donnée à la conduite de Pétion dans ces circonstances, quels motifs on lui a attribués.
Christophe venait de se retirer, en passant à l’Arcahaie et à Saint-Marc ; il s’était arrêté à Marchand avec le gros de son armée.
« De son côté, Pétion ne sortit du Port-au-Prince que plusieurs jours après la levée du siège. C’eût été une faute grave, s’il n’avait pas, à dessein, laissé à Christ-