Page:Ardouin - Étude sur l’histoire d’Haïti, tome 6.djvu/520

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

mens, eu envoyant à Goman le brevet de général de brigade, en lui faisant dire par ses émissaires qu’il fallait venger la mort de Dessalines que les mulâtres avaient tué, parce quils ne voulaient pas obéir aux noirs. Il réveilla ainsi tous les vieux levains de discorde que les colons avaient fait fermenter dans la Grande-Anse.

Bergerac Trichet et Thomas Durocher combattirent contre les insurgés, comme tous les autres officiers. Ils ne furent pas les auteurs de cette insurrection ; mais d’autres faits subséquens seront produits à leur charge, et ce sont ces faits qui auront probablement motivé l’imputation que nous réfutons.


Presque toutes les familles du Port-au-Prince s’empressèrent d’y retourner après la retraite de Christophe. Ceux des députés du Nord et de l’Artibonite, qui n’avaient pas voulu fuir le 1er janvier, exposant leur séparation des leurs par la guerre, eurent la faculté de partir et de se rendre dans leurs foyers. Rien n’était plus juste, la République n’ayant pas été fondée pour opprimer les hommes, mais bien pour qu’ils jouissent de leur entière liberté.

Cette faculté qu’ils réclamèrent fit naître en même temps de graves questions, qu’il fallait résoudre au plus grand avantage de la République naissante.

Le militaire avait rempli son devoir avec honneur, en résistant à l’invasion, en repoussant l’ennemi du siège de la représentation nationale. Le rôle de l’homme d’Etat commençait maintenant ; il avait à remplir aussi son devoir envers la patrie. Le premier n’avait eu qu’à dégainer le sabre, qu’à bien diriger son fusil et sa pièce de canon, qu’à développer du courage sur le champ de bataille. Le second avait à concevoir des idées judicieuses,