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mes, peut-elle avoir dans ces accusations de Christophe contre ses adversaires ? Se voyant déjoué dans ses projets ; ne voulant pas reconnaître que ses rigueurs despotiques étaient la seule cause des désertions des soldats ; que les troupes refusaient la solde ordonnée par lui, parce que tout d’abord on leur avait donné une paye supérieure ; que leur mutinerie, leur insubordination, n’étaient que le résultat de la révolution qui les avait exaltées : il se plaisait à rejeter ses propres torts sur Pétion et d’autres. Est-ce que Pétion n’avait pas persuadé les 11e et 12e demi-brigades de recevoir la solde régulière ordonnée par lui, en leur rappelant qu’elles lui devaient une obéissance absolue ? Ayant agi ainsi à l’égard de deux corps qu’il était de son intérêt de ménager, il ne pouvait envoyer des agents secrets pour en soulever d’autres par ce motif. Nous avons assez établi les causes de la désertion des jeunes gens de la 4e, de ses musiciens et du bataillon de la 20e, pour ne pas revenir ici sur ces incidens.

Ce fut donc après avoir lancé sa proclamation du 18 décembre, que le 19 il écrivit sa lettre arrogante à Pétion. Quelque ton de supériorité qu’il y prît, on reconnaît que, se voyant déjoué, il se préparait à la guerre, car il ne pouvait espérer que Pétion eût souffert patiemment de telles paroles, après l’avoir signalé dans sa proclamation par un langage aussi malveillant ; il connaissait son caractère résolu, malgré sa modération habituelle.


Enfin, le 18 décembre les députés réguliers et irréguliers se réunirent à l’église du Port-au-Prince et ouvrirent les séances de l’assemblée constituante. La première eut lieu sous la présidence de César Thélémaque, doyen d’àge et député du Cap. La vérification des pouvoirs