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l’armée, ce qui était encore plus mal, et ce qui rendrait l’armée et les citoyens très-méfians, si l’assemblée se réunissait au Cap ; 3o  enfin, que cette armée et ces citoyens l’ayant proclamé chef provisoire du gouvernement jusqu’à la nouvelle constitution, l’acte de Résistance à l’Oppression n’entendait pas que d’autre que lui le fût définitivement ; que l’assemblée n’aurait que le pouvoir de désigner sous quel titre ou qualification il exercerait l’autorité gouvernementale, tout en ayant celui d’adopter les institutions que voudrait le pays par l’organe de ses mandataires.

Ce serait donc après ces observations judicieuses, qui suivirent sa lettre du 26 octobre, que Christophe se sera décidé à désigner le Port-au-Prince, comme siège de l’assemblée[1]. Ils étaient encore, l’un et l’autre, dans la lune de miel de la révolution ; et Christophe, en cédant, put espérer à son tour que Pétion userait de toute son influence sur les députés réunis, afin de donner une organisation vigoureuse à l’autorité du chef du gouvernement, parce qu’un militaire éclairé, comme il l’était, devait en sentir la nécessité.

Mais Bonnet revint du Cap, presque en même temps que la circulaire fut adressée aux généraux pour la convocation des électeurs. Le compte qu’il rendit à Pétion, de l’apostrophe qu’il reçut par rapport à la mort de Mentor et de Boisrond Tonnerre, ne dut pas le rassurer sur les intentions de Christophe ; peu de jours après survint la lettre de ce dernier à Yayou, en date du 10 novembre,

  1. Il semble même, d’après l’écrit publié par Pétion le 17 janvier 1807, qu’il aura conseillé à Christophe de convoquer « des représentans de toutes les communes, ou paroisses, » pour faire la constitution : d’où un pour chaque paroisse. Cette lettre du 26 octobre, où il était question de l’assemblée, fut apportée par Blanchet jeune. Hist. d’Haïti, t. 3, p. 345.