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de lui, « Christophe qui avait à ses côtés plusieurs office ciers, le prît à l’écart et lui demanda aussitôt ce que l’on avait fait de Mentor. Bonnet lui répondit qu’il l’avait laissé au Port-au-Prince, sain et sauf. — Je suis fâché, répliqua Christophe, qu’on l’ait épargné ; on eût dû l’exécuter ou le déporter. Eh bien ! je ne serai pas du reste plus méchant que vous[1]. » Ainsi, il sanctionnait d’avance le meurtre de Mentor !

Sur son invitation, Bonnet retourna au Cap où il allait se rendre lui-même. Cet officier y fut entouré des espions que le général Richard, commandant de cette ville, envoyait chez lui pour épier ses moindres paroles et celles des nombreux visiteurs qui y affluaient[2].

C’est alors que les émissaires, envoyés au Port-au-Prince, revinrent auprès de Christophe. Sur leur rapport — « Christophe comprit que l’on ne s’était servi de son nom que pour donner de la consistance à l’insurrection. Il se défia davantage de Pétion, de Géiin et des autres « officiers de l’Ouest et du Sud. Il ne songea plus qu’à déjouer leur projet…[3] »

Comme cette tradition peut égarer et faire la partie belle à H. Christophe, pour arriver enfin à la guerre civile ! Plus avant, pages — 287 et 288, M. Mauiou a prouvé (à notre pleine satisfaction), par des raisonnemens judicieux, qu’il y eut conspiration entre Christophe et Geffrard pour abattre Dessalines ; que cette trame devait recevoir son exécution aux Cayes, par Geffrard, s’il ne fût pas mort ; mais ce général aurait-il pu, seul, accomplir ce dessein ? N’était-il pas obligé d’y faire entrer d’autres

  1. Hist. d’Haïti, t. 3, p. 346.
  2. Ibid.
  3. Ibid., t. 3, p. 347.