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voir des chefs révolutionnaires ; car Christophe en était un, et le principal, puisqu’il avait suggéré l’entreprise et qu’il en recueillait les avantages.

Entre ces trois généraux, lequel fut le plus conséquent aux principes posés comme base de la révolution de 1806 ; lequel employa le meilleur moyen, non-seulement pour le rétablissement de l’ordre, mais aussi pour le maintien de la liberté du peuple haïtien ? Qui d’entre eux rappela mieux les militaires mutinés à l’observation de leur devoir, en maintenant le respect dû à l’autorité ?

Si Christophe l’imposa par la force, par la terreur, c’est qu’il agissait sur des esprits toujours asservis au joug d’un despotisme brutal. En inaugurant ainsi l’exercice de son pouvoir, il fut contraint lui-même de pousser son système de gouvernement jusqu’à ses dernières limites, et l’on sait d’avance quel fut son sort en définitive. Mais la liberté, régna-t-elle avec lui ? Ne pouvait-il pas opérer autrement qu’il ne fit ? Oui, sans doute, s’il avait au fond du cœur cette bienveillance qui recommande un chef à l’amour de ses concitoyens, et non cette cruauté qui le fait haïr, en toute justice.

Si Gérin réussit dans le Sud, il ne dut peut-être son succès qu’à la sagesse d’un officier dévoué au bonheur de ses frères, désireux de lui faciliter sa tâche : en lui résistant, il le rappela à l’observation des principes de la révolution ; car il s’en était écarté, en méconnaissant encore l’esprit des populations sur lesquelles il agissait. Néanmoins, on aperçoit tout d’abord pourquoi Gérin ne conserva aucune influence réelle dans le Sud : son despotisme y était trop connu pour en obtenir.

Pétion réussit également, dans l’Ouest, à calmer les esprits agités par la fougue révolutionnaire. Employa-t-il