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Il écrivit à Pétion :

Mon camarade,

Je m’empresse de répondre à votre lettre du 16 (18) courant, qui vient de m’être remise avec les exemplaires de la déclaration faite par les divisions du Sud et la 2e division de l’Ouest.

Les griefs que vous exposez contre la conduite et les actes arbitraires dont nous avons été tes tristes témoins et les tristes victimes, et qui nous plaçaient dans un état de nullité sous le règne qui vient de passer, méritent la plus grande attention pour assurer l’empire des lois dans le pays. Les mesures que vous avez prises pour le maintien de l’ordre, dès qu’elles étaient nécessaires, sont sages. J’ai agi de même ici, en ordonnant, en ce moment, que les divisions du Nord et la première de l’Ouest fussent payées et habillées. Faites connaître à tous nos frères d’armes de l’armée du Sud et de l’Ouest, que j’approuve la bonne conduite qu’ils ont tenue en cette circonstance, puisque l’ordre n’a pas été troublé : ce qui doit toujours être la base de notre constitution.

Le choix qu’ils ont fait de moi, en m’appelant à la place honorable et pénible du gouvernement, impose de grandes obligations. Personne mieux que vous, mon camarade, ne connaît mes principes et mon désintéressement pour toute espèce d’emplois ; il a fallu un aussi puissant motif pour me déterminer à accepter ce fardeau énorme, avec la persuasion que j’ai, que vous concourrez, en votre particulier, à m’aider de vos lumières lorsque le bien public l’exigera.

Je m’étends plus au long, par cette occasion, avec le général Gérin, à qui j’écris ; je vous prie de vous entendre avec lui pour maintenir le bon ordre, jusqu’à ce que les lois soient définitivement organisées : ce qui ne doit pas éprouver de retard.

J’ai l’honneur de vous saluer avec considération,

Signé : Henry Christophe.

Par ces deux lettres, il acquiesçait formellement à l’événement tragique qui le plaçait au pouvoir : à chacun des deux généraux, du reste, il tint un langage convena-