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Il semble que la Providence voulut qu’elle fût l’œuvre du peuple lui-même, pour lui apprendre qu’il doit compter sur sa puissance souveraine, pour apprendre aux chefs de gouvernement qu’ils ne tiennent leur pouvoir, leur autorité, que de la volonté nationale.

Nicolas Geffrard, fils d’un mulâtre et d’une négresse du sang sénégalais, avait ce beau teint qu’on remarque dans les colonies, sur les individus qui proviennent de cette nation africaine dont le type se rapproche le plus de celui de la race blanche, au physique, dont le moral atteste une supériorité sur celui des autres tribus de cette contrée. Né sur l’habitation Périgny, dans les hauteurs du camp Périn, où demeuraient son père et sa mère, deux affranchis, il avait de 44 à 45 ans à sa mort. Prenant parti avec sa classe dès 1791, il ne cessa de se distinguer à la guerre où il obtint tous ses grades militaires par sa bravoure et son mérite. Ses talens étaient naturels, car son éducation fut négligée comme celle de la plupart des hommes de sa classe. Dans la société privée, il joignait la politesse la plus affable à une urbanité exquise ; mais comme homme public, il était d’une fermeté, d’une résolution qui allaient par fois à la violence, pénétré surtout, en sa qualité de militaire, que la discipline et la subordination exigeaient cette manière d’être. La bonté de son cœur tempérait cette rudesse, au point que ses subordonnés lui obéissaient plutôt par estime, par amour, que par crainte. — Son corps fut enterré à la citadelle des Platons, et ses entrailles sur la place d’armes des Cayes.

Nous avons assez cité son nom dans nos volumes précédens, surtout dans le 5e, pour ne pas revenir sur toutes les actions éclatantes qui le firent remarquer parmi ses compagnons d’armes, qui lui valurent la haute considé-