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souvenir qui devait faire impression sur les autres généraux, sinon sur l’empereur. Il parut satisfait des explications de Geffrard et de Pétion, et les invita tous à retourner à leurs commandemens respectifs. Mais avant de se séparer de Christophe, Pétion et Geffrard lui promirent de ne pas renoncer à la résolution dont ils étaient tous trois convenus, comme le seul moyen de sauvegarder leur vie et de mettre un terme à l’existence d’un gouvernement, dont le chef oubliait si facilement les services rendus au pays et à son autorité, et qui ne pouvait faire le bonheur du peuple[1].

Telle fut la conjuration ourdie à Marchand contre les jours de Dessalines, mais qui s’évanouit bientôt par la mort de Geffrard. Le renversement, la mort de l’empereur eut lieu ensuite, comme une conséquence de cette conjuration, mais par de nouvelles causes que nous aurons à relater.

Qui provoqua cette conjuration ? H. Christophe, qui avait même devancé le projet d’assassinat de Pétion et de Geffrard, par la mission de Blanchet. Qui fut cause qu’elle s’ourdît entre eux ? Dessalines personnellement. Etait-il juste qu’il conçût le dessein d’immoler ces deux généraux à ses soupçons, avait-il des raisons suffisantes, même pour les faire juger par un conseil spécial qu’il pré-

  1. L’Hist. d’Haïti, t. 3, p. 261, dit même : « Les généraux partirent de Marchand et se rendirent dans leurs commandemens respectifs, rêvant la plupart aux moyens d’abattre Dessalines. Le mécontentement était devenu tel, qu’une révolte sur un point quelconque de l’empire devait produire un embrasement général. »

    Nous ignorons complètement s’il y eut d’autres que Christophe, Pétion et Geffrard, qui pensèrent à cela ; mais il se peut que d’autres officiers, témoins des reproches adressés à ces deux derniers qui étaient généralement estimés, peut-être aussi avisés du projet qui avait failli être mis à exécution contre eux, aient reconnu que Dessalines n’offrait aucune garantie, et qu’il était à désirer qu’il fût abattu.