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Dans un voyage que fît le général Vernet, ministre des finances, au Port-au-Prince, ce colonel l’invita à aller passer une nuit sur l’ancienne sucrerie du baron de Santo-Domingo qu’il tenait à ferme de l’Etat. Il lui fit voir les belles plantations de cannes qui y existaient comme dans l’ancien régime, et lui dit : « Demain matin, ministre, vous boirez votre café avec du sucre de ces cannes. — C’est impossible, colonel, on n’en aurait pas le temps. — Ministre, remarquez les cannes de cette pièce ; c’est de là que sortira le sucre que je vous ferai présenter demain matin avec votre café, et on les coupera à une heure après minuit. » La gageure fut acceptée et gagnée par le commandant de l’arrondissement du Port-au-Prince. Il avait peut-être obtenu un résultat plus grand que celui de l’empereur, qui fonda une sucrerie à Marchand-Laville en moins d’une année.

Par ses soins, les plantations de cannes sur l’ancienne sucrerie de Caradeux le cruel, devenue l’une des fermes de l’empereur, avaient été effectuées en deux mois. Les cultivateurs avaient dû travailler nuit et jour. Il est vrai qu’à l’arrivée des Français, en 1802, ils s’étaient mutinés contre Dessalines à son passage dans la plaine du Cul-de-Sac : sous Toussaint Louverture, il tenait aussi cette habitation à ferme.


Peu après le voyage de Dessalines au Port-au-Prince, la mort de Gabart survint à Saint-Marc, où il était malade. Né au Dondon le 28 octobre 1776, il mourut le 30 octobre 1805, à l’âge de 29 ans. Il avait commencé sa carrière militaire dès les premiers momens de la révolution, et il gagna tous ses grades par sa bravoure sur le champ de bataille. Sans instruction, aveuglément soumis aux ordres