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comme un homme peu éclairé, le retrouvant chef suprême du pays, exerçant une autorité absolue, livré à toutes ses passions, entouré d’officiers qui les flattaient pour le dominer, il vit d’un coup d’œil le parti qu’il pouvait tirer lui-même de sa position près de lui. Mentor s’exprimait avec facilité ; il avait une belle figure, une physionomie attrayante, des formes qui avaient emprunté toute la politesse des hauts personnages auxquels il s’était trouvé mêlé en France. Il fit servir tous ses avantages personnels à gagner l’affection de Dessalines, en le flattant surtout pour ses glorieux succès contre les Français, en les représentant incessamment comme des monstres qu’on ne saurait trop haïr. Il fit enfin si bien, qu’il réussit à persuader Dessalines qu’il ne pouvait être un traître, et qu’il devint réellement un de ses favoris.

Presque en même temps que Mentor, — Dartiguenave, Bigot et David-Troy arrivèrent aussi en Haïti. David-Troy avait suivi le général Lavalette, lors de l’évacuation du Port-au-Prince en octobre 1803, n’ayant pas confiance dans un bon accueil de la part de Dessalines, après avoir servi les Français avec tant de zèle au Mirebalais. Il avait ainsi ajouté au tort qu’il eut de repousser les conseils de Pétion, et ce fut cependant auprès de celui-ci qu’il se rendit en revenant dans le pays, comptant sur son ancienne amitié. Quant à Dartiguenave, qui était resté en France pendant l’expédition de 1802, il avait réussi à s’en échapper : il en fut de même de Bigot, déporté avec Bigaud et d’autres, en 1802.

À la mi-janvier, l’empereur quitta Marchand pour venir au Port-au-Prince, emmenant avec lui le général Yayou qu’il retira de l’arrondissement de la Grande-Rivière pour le placer à celui de Léogane, après avoir ap-