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Peu après, arriva le fameux Mentor dont nous avons signalé la finesse, l’adresse politique dans une mission dont Sonthonax l’avait chargé en 1797, dans les arrondissemens de Léogane et de Jacmel[1]. Lorsque ce commissaire fut expulsé par T. Louverture, Mentor était parti avec lui ; préalablement élu membre du corps législatif, il avait alors le rang, le grade d’adjudant-général que T. Louverture avait demandé pour lui à Sonthonax[2]. Rendu en France, il fut admis au conseil des Cinq-Cents. On prétend qu’au 18 brumaire il s’était manifesté contre le général Bonaparte, et qu’il fut emprisonné comme Sonthonax et d’autres.

Mentor ayant appris l’exécution de Ducoudray, prit le meilleur parti pour échapper à un sort semblable : il fut tout droit à Dessalines à qui il avoua qu’il avait reçu la même mission. Mais il lui dit, qu’ayant été persécuté à cause de sa couleur noire, désirant de quitter la France et d’éclairer le gouvernement haïtien et ses frères, sur les embûches que leur tendait le gouvernement français pour les subjuguer, il avait paru se prêter à cette mission.

Cette manœuvre adroite réussit complètement auprès de Dessalines[3]. Mentor fut maintenu dans son grade d’adjudant-général et devint aide de camp de l’empereur, pour le malheur de celui-ci ; car, rayant déjà connu

  1. Voyez t. 3 de cet ouvrage, p. 334 à 336.
  2. Le 12 mai 1797, Sonthonax écrivit à T. Louverture, que E. Mentor désirait faire avec lui la campagne qu’il projetait contre Saint-Marc et qui fut effectuée dans ce mois. Le 24, sur la demande de T. Louverture, Sonthonax promut Mentor au grade d’adjudant-général. Le général en chef avait découvert le mérite réel de son protégé.
  3. Le général Dessalines était de la campagne dont il s’agit dans, la note précédente. Il est probable que Mentor, si adroit, avait su capter son estime et son amitié à cette époque.